jeudi 28 juillet 2011

Bien Profond

Pardonnez cette écriture à l'arrache. Il me tardait de vous raconter cette histoire, véridique en tous points. J'ai pris la précaution de maquiller les patronymes...

Victor est né en quarante-six. Dans les années de fin de guerre, c'était encore un petit gars. Aujourd'hui, il se souvient encore de ces temps difficiles, à bouffer des patates et du pain. C'est peut-être en raison de ce fait - il a connu les années de vaches maigres d'après guerre, qu'il est sensible aux difficultés de ses congénères, et qu'il milite parfois côté gauche, non loin de mon bord.
Victor regorge de bonnes histoires à raconter. Il a bien conservé sa tête, sa mémoire est restée parfaite. Il parle beaucoup. A chacune de nos rencontres, il livre souvent à mon attention une anecdote croustillante. J'ai complètement craqué sur celle qu'il m'a racontée hier soir, et ne peut m’empêcher de vous la résumer, tant elle est étonnante.

Il y a quelques années, à l'époque où le gouvernement préparait sa loi sur la taxe carbone, mon Victor, consterné à l'idée que le bon consommateur  supporterait encore un impôt complémentaire et injuste, saisit l'ordinateur de sa compagne, et se rendit sur un site du ministère dédié à cette affaire.
Sur un article concernant la présentation de la loi, il déposa le commentaire suivant: " merci de bien vouloir nous indiquer la marque de vaseline adéquate. " Signé: Aurloi.

Pas plus de deux semaines s’écoulèrent entre le fameux message et le jour où deux messieurs lui rendirent visite.
Les deux costumés frappèrent à sa porte.  Il sortit à leur rencontre.
Les types recherchaient Mme Brendal, nom de la compagne de Victor.
 
" Elle est sortie faire quelques courses. C'est à quel sujet ? Leur demanda-t-il.
- Hmn... Peu d'importance Monsieur. A tout hasard, connaitriez-vous Mr Aurloi ? Demanda un des deux.
- Moi-même.
- Nous souhaiterions nous entretenir un moment avec vous."
 
Il les fit entrer. L'un se présenta comme un membre de la police du département. L'autre ne lui tendit même pas la main.
Victor est retraité de la gendarmerie nationale. Il échangea cordialement avec le policier. L'agent de police lui expliqua l'objet de sa visite: le message sur le site du gouvernement.
" C'est bien vous qui l'avez écrit ? Questionna t-il. Voyez monsieur, expliqua l'officier, il vaut mieux éviter ce genre de plaisanterie sur cet espace démocratique. C'est quelque peu dommageable..."
 
Victor expliqua son mécontentement, répondit qu'il était dans ses droits, et prendrait garde aux termes utilisés la fois prochaine - pour lui ça n'était pas une dernière.
Tout en discutant, il leur offrit une collation. Le deuxième ne bronchait toujours pas.
 
" Et vous monsieur, en quelle qualité me rendez-vous visite? Demanda Victor.
- Je suis adjoint au député U.M.P, et j'accompagne ce monsieur."
Victor fut consterné. Il constata que l'exécutif et le judiciaire s'étaient donné la main à l'occasion de cette rencontre. Il ne manquait plus qu'un juriste pour compléter le tableau. Les principes fondamentaux de la République étaient bafoués sous ses yeux.
 
Il les raccompagna. Salua l'agent de police en prenant garde de ne pas orienter sa main vers l'autre, qui restait de marbre, ne souhaitant aucun contact avec mon ami.

Les gars, nous sommes fliqués ! Pas de favoritisme dû au rang, au sang, à la profession, rien.
Big Brother is watching us.


3 commentaires:

  1. je pense que je vais aller faire deux ou trois petits coms sur le site des différents ministères qui me gonflent juste pour faire fonctionner la démocratie !

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  2. Hier soir, j'ai reve que je mangeais un enorme marchmalo,ce matin je me suis reveillé j'avais plus d'oreillé.
    bonne journée cres

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  3. @ LH : Tiens nouvel avatar... l'a de la gueule ;-)
    Ben... c vrai qu'on pense pas à aller mettre des comms marrants sur ce genre de blog, de temps à autres.

    @ cres : Mouaps ! T'as encore une plume coincée entre les dents, on dirait ;-)

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